À l’occasion de la Journée Mondiale des Refugiés, le Groupe d’Appui aux Rapatriés et Refugiés (GARR) exprime sa vive inquiétude face à la situation des migrant-e-s haïtien-ne-s en quête de refuge, notamment celles et ceux se trouvant au niveau de la frontière américano-mexicaine.
En effet, depuis septembre 2021, Haïti a connu une crise migratoire de grande envergure marquée par l’arrivée sur son territoire de plusieurs dizaines de milliers de migrants expulsés, pour la plupart, des Etats-Unis et du Mexique. Selon l’Organisation Internationale de la Migration (OIM), entre le 1er janvier 2021 et le 21 février de cette année, 25 765 individus ont été victimes d’expulsions forcées vers Haïti.
Les Etats-Unis à eux-seuls ont expulsé 20 309 Haïtiens, soit 79% du chiffre total. A nos jours, malgré la poursuite des expulsions vers Haïti, il n’en demeure pas moins qu’un nombre considérable de réfugiés haïtiens se trouvent encore présents dans certaines villes frontalières du Mexique, notamment à Tapachula et à Tijuana.
Ces Haïtiens, pour la plupart, ont laissé le pays à cause de la détérioration du climat sécuritaire et de leurs conditions de vie déjà fortement fragilisées par les catastrophes naturelles. Arrivés à la frontière américano-mexicaine, beaucoup d’entre eux ont été brutalisés, discriminés, humiliés par la police frontalière, puis incarcérés avant d’être expulsés vers Haïti en violation de leurs droits, sans même avoir la possibilité de formuler une demande d’asile.
Sous couvert du « Titre 42 » dont la validité devait déjà échoir, les Etats-Unis refusent à ces derniers leurs droits à la protection afin de les forcer à retourner en Haïti. Et, en dépit des menaces qui pèsent sur leur vie, il ne leur est pas accordé la possibilité de formuler une demande d’asile. Interrogée par Global Press Journal, une refugiée haïtienne exprimant son désarroi eut à déclarer : « Plutôt mourir que de retourner là-bas ».
Le GARR juge inefficace cette politique migratoire mise en place par les États-Unis car, nombre de gens qui craignent pour leur vie ou leur avenir n’ont pas l’intention de rester en Haïti. Ils tenteront continuellement leur chance d’accéder au territoire américain. C’est d’ailleurs ce que confirme une enquête de l’OIM menée auprès de 383 personnes expulsées. Selon cette enquête, 69% d’entre elles ne se sentent pas en sécurité dans le pays et 84% souhaitent repartir à cause de la dépravation économique, politique et sécuritaire dans le pays. Par ailleurs, les migrants haïtiens bloqués au Mexique ont du mal à s’en sortir. Faute de documentation, la possibilité de trouver du travail demeure très mince.
En outre, ils peinent à trouver de la nourriture ou à se loger dignement. Certains sont victimes au quotidien de vol et Page 2 of 2 d’abus de tout genre de la part de la police mexicaine. Ceux qui souhaitent obtenir le statut de réfugié ne trouvent pas l’accompagnement juridique nécessaire et le fait que certains d’entre eux ne parlent pas espagnol, cela complique davantage le processus.
Les migrants haïtiens sont aussi victimes de racisme, de discrimination à l’embauche et dans les hôpitaux où ils sollicitent des soins. Comme ils ne sont pas pris en charge dans les hôpitaux, certains meurent sous le coup de maladies liées à de mauvaises conditions de vie et des sévices corporels. Ces dernières années sont essentiellement marquées par une violence exacerbée des gangs armés au niveau des quartiers populaires alimentant entre autres le climat d’instabilité politique, de chômage et d’insécurité alimentaire. Le premier juin dernier rappelle, un an de cela, le déplacement en masse de milliers de familles vivant à Martissant, Fontamara, Bel-Air et Bas Delmas. Ces derniers ont été contraints de fuir leur domicile à cause de la violence engendrée par l’affrontement de groupes armés pour le contrôle de ces zones.
La violence contre la population civile s’est étendue à la commune de Croix-des-Bouquets, la Plaine du Cul de Sac, les quartiers de Torcel, Pernier, etc. Ce lundi matin, Torcel a encore été le théâtre d’actes de violences. Selon l’OIM, plus de 23 000 déplacés internes ont été répertoriés pour la période allant du 23 avril au 6 mai 2022 au niveau de la Croix des Bouquets, de Cité soleil et de la commune de Tabarre.
Au regard de toutes ces graves violations de droits humains que subissent les migrants haïtiens en situation de réfugiés, la plateforme GARR appelle à une solidarité plus conséquente et des traitements plus humains envers les migrants. Le GARR plaide en faveur de la suspension de l’application du « Titre 42 » afin de garantir le respect au droit d’asile pour les réfugiés. Au niveau national, le GARR exhorte les autorités à engager des efforts afin de freiner l’insécurité grandissante et la pagaille économique pour que les couches vulnérables ne continuent pas à risquer leur vie dans des voyages irréguliers et périlleux en quête de paix et de mieux-être.